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Séminaire de recherche interdisciplinaire "Cultures populaires, culture savantes"
L'équipe de recherche MARGE organise son nouveau séminaire de recherche consacré aux cultures populaires et savantes. Ce séminaire, envisagé sur deux ans, est composé de trois journées d'études par an. Il est coordonné scientifiquement par Frédéric AUBRUN, Catherine DESSINGES, Anna LUSHENKOVA FOSCOLO et Lucien PERTICOZ. Le séminaire débutera le 29 novembre 2019 avec les interventions de Philippe LE GERN et Jacques MIGOZZI. L'objectif de ce séminaire est de discuter autour de la dialectique "cultures populaires/cultures savantes" de façon interdisciplinaire en faisant intervenir des chercheurs en littératures et en sciences de l'information et de la communication.
Le séminaire est ouvert à tous dans la limite des places disponibles.
Contact : Frédérique LOZANORIOS frederique.lozanorios@univ-lyon3.fr / En savoir + sur MARGE
Programme de l'année 2019-2020 :
Vendredi 29 novembre, salle 7, Manufacture des tabacs, 13h-16h
Philippe Le Guern : « De la fiction TV aux musiques actuelles : Socio-analyse d'une recherche au long cours consacrée aux cultures populaires »
Jacques Migozzi : « Du « populaire » au « médiatique » ou petite histoire d’une désincarcération théorique et axiologique du regard savant sur les fictions de grande consommation »
Vendredi 31 janvier, salle Caillemer, 10h – 12h puis 13h30 – 16h
Anne Besson : « Quelle(s) légitimation(s) pour les littératures de genre et de grande diffusion ? »
Vladimir Lifschutz : « Image identitaire ou l'élaboration de l'identité par la série
télévisée »
Henri Garric : « Ambiguïtés de la légitimation dans le champ de la bande dessinée »
Vendredi 20 mars, salle Caillemer, 13h-16h
David Peyron : « De la mort de l’auteur à l’auteur zombie.
Évolution du statut auctorial dans la culture populaire contemporaine »
Marie-Eve Thérenty : « Auteurs sous contraintes : génétique de la littérature
médiatique »
Problématique :
La culture populaire, dans l’acception académique actuelle du terme, fait avant tout référence aux diverses formes de productions qui suivent la période de la révolution industrielle, à commencer par des romans feuilletons du XIXe siècle, puis des formes contemporaines dont la BD, les séries et les jeux vidéo. Cette notion ne se limite pas pour autant à ces objets d’étude de « cultural studies » : elle apparaît en effet bien avant l’explosion de la presse écrite de grande diffusion ; on désigne ses formes les plus anciennes par les termes de littérature orale. Ce domaine où l’on inclut contes, légendes, chansons, devinettes, proverbes, etc., dépasse l’intérêt anthropologique ; ces matériaux ont souvent constitué des sources qui ont nourri et stimulé l’apparition des littératures écrites, dont certaines épopées nationales comme par exemple le Kalevala. L’étude des formes primaires de la culture populaire n’est donc pas réservée aux célèbres folkloristes du XIXe siècle. Il est intéressant de voir comment la vision de ce champ de l’imaginaire a été élaborée et comment elle évolue dans différentes aires géographiques. Il est probant à cet égard de s’intéresser à la constitution des recueils des formes primaires de la culture populaire dans différents pays, ou encore à l’apparition des ouvrages inspirés du folklore à l’époque romantique (citons à titre d’exemple Les Soirées du Hameau de Gogol, 1831). La première observation que l’on peut formuler concerne les liens à la fois solides et ambiguës qui relient les domaines « populaire » et « savant » : les premiers auteurs qui cherchent à fixer par écrit les différentes formes de la culture populaire sont en réalités des savants, souvent philologues ou linguistes, à l’instar des frères Grimm en Allemagne et de Vladimir Dahl en Russie. Comme le note Elisabeth Wanning Harries dans son ouvrage Twice Upon a Time : Women Writers and the History of the Fairy Tale (2001), “En réalité, ces contes que nous appelons actuellement contes de fées, ont principalement été créés par des personnes instruites et cultivées qui ont parfois imité ce qu’ils considéraient comme des contes des gens moins instruits et moins cultivés ». Cette constatation, qui peut s’appliquer à d’autres genres que le conte, offre à des chercheurs contemporains un argument valable pour affirmer la suprématie constante de la culture dite savante : cette dernière fournit constamment les moyens discursifs qui forment la représentation de la culture populaire. Pour citer Jan Baetens, les « représentations de la culture populaire ne sont jamais construites de l’intérieur : ceux qui « vivent » la culture populaire ne sont jamais ceux qui en (re)construisent la représentation ». La première séance (29/11/19) sera ainsi consacrée à la question des perceptions réciproques de ces pôles : on verra ainsi comment la culture savante aborde-t-elle la culture populaire et inversement. La question de la légitimité culturelle sera centrale. Les transferts et passages entre la culture populaire et savante seront envisagés en particulier à travers l’étude des adaptations cinématographiques et littéraires. Il sera également question des genres, sujets et thèmes issus du domaine de la culture populaire, et qui dans certains cas nourrissent les genres les plus « nobles », en particulier dans le domaine du corpus romanesque canonique. On pourra ainsi observer des transpositions réciproques entre ces deux pôles. L’évolution de la conception même du canon pourrait également être questionnée à cette occasion. La seconde séance (31/01/20) abordera la culture populaire dans les études de la littérature et les industries culturelles et médiatiques. Tremblay rappelle que « les chercheurs (…) s’entendent généralement pour reconnaître que les industries culturelles présentent des caractéristiques qui, prises une à une, peuvent se rencontrer dans d’autres secteurs industriels, mais qui, prises dans leur ensemble, ne se retrouvent que dans ce secteur auquel elles configurent un profil particulier » (Tremblay, 2008, p. 70). En ce sens, il peut être intéressant de revenir sur les spécificités de chacune des filières des industries culturelles et médiatiques, incluant l’industrie vidéoludique (Perticoz, 2009), et d’interroger leur rapport à la culture populaire. De la quête de légitimité scientifique au déploiement de moyens d’expression spécifiques, la BD, la série TV, le jeu vidéo sont des objets à privilégier dans le cadre de cette seconde séance pour continuer à explorer la dialectique culture savante/populaire. La troisième séance (20/03/20) sera articulée autour de la notion de l’auteur. Comment l’auteur est-il considéré par la culture légitime et savante et comment son rôle social a évolué dans la culture populaire et industrielle ? Seront notamment évoqués la place et la légitimation des auteurs, les dispositifs techniques, les contraintes du genre, du contexte, de la filière. La question de l’auteur dans les franchises sera notamment soulevée et discutée.